« L’architecture, c’est établir des relations affectives avec les matières premières », affirme Le Corbusier dans son ouvrage phare de 1923, Vers une architecture, qui pose les bases de l’architecture brutaliste.
Ce mouvement architectural, qui s’est développé entre les années 1950 et 1970, est reconnu pour son esthétique robuste et fonctionnelle et ses formes modulaires souvent rigides. Le terme « brutaliste », inventé par l’historien de l’architecture Reyner Banham, vient du français béton brut, qui signifie « béton rugueux », soulignant l’utilisation de béton apparent non fini.
Apparu en opposition au modernisme, le brutalisme visait à produire des structures fonctionnelles pour les institutions publiques telles que les universités, les bibliothèques et les projets de logement, en incarnant les principes d’honnêteté structurelle et d’accessibilité sociale.
Bien qu’il ait fait l’objet de nombreuses critiques, le brutalisme a connu un regain de popularité, attribué en grande partie à la nature photogénique de ces bâtiments, qui en font des sujets idéaux dans notre culture contemporaine axée sur le visuel, comme en témoigne leur popularité sur des plateformes telles qu’Instagram.
Ces dernières années ont vu une prolifération de livres photographiques sur le genre, l’Atlas of Brutalist Architecture de Phaidon Editors étant l’un des plus complets. Par ailleurs, un film d’architecture réalisé par Brady Corbet et présenté à la Mostra de Venise cette année, « The Brutalist », avec Adrien Brody, offre une représentation convaincante de l’impact esthétique et social du brutalisme.
5 caractéristiques clés pour identifier l’architecture brutaliste
L’architecture brutaliste, connue pour l’importance qu’elle accorde à la fonctionnalité pratique et à une approche centrée sur la communauté, présente souvent une esthétique qui peut sembler dure, mais qui est porteuse de stabilité et d’égalité. Les architectes les plus connus de ce style sont Le Corbusier, James Stirling, Alison et Peter Smithson, Paul Rudolph et Marcel Breuer. Voici cinq caractéristiques qui définissent l’architecture brutaliste :
Utilisation dominante du béton apparent
Inachevé et visiblement brut, le béton est le matériau emblématique du mouvement brutaliste, souvent rugueux et portant les empreintes de son coffrage.
Formes géométriques massives
Généralement monolithiques, les structures brutalistes présentent des formes géométriques lourdes et clairement définies. Leur esthétique imposante et sévère, avec des blocs austères et des angles aigus, projette une solidité de forteresse.
Fonctionnalité exprimée de l’extérieur
Dans les constructions brutalistes, la fonction dicte la forme. Les composants structurels et fonctionnels sont exposés de manière proéminente, ce qui les rend essentiels à l’esthétique du bâtiment.
Austérité et minimalisme ornemental
Dépourvus d’ornements décoratifs, les bâtiments brutalistes mettent en valeur la beauté brute de leurs matériaux et de leurs formes architecturales, en insistant sur la simplicité et l’absence d’ornementation.
Interaction avec le contexte urbain
Les bâtiments brutalistes sont conçus pour avoir un impact monumental sur leur environnement, s’intégrant souvent dans le paysage urbain de manière à attirer l’attention et à susciter la réflexion.
5 exemples emblématiques de l’architecture brutaliste
L’architecture brutaliste a profondément influencé les bâtiments culturels, gouvernementaux et sociaux du monde entier, inspirant des architectes contemporains tels que Peter Zumthor, Álvaro Siza et David Chipperfield. Voici cinq exemples marquants de ce style architectural :
Unité d’Habitation – Marseille, France
Exemple par excellence de l’architecture brutaliste de Le Corbusier, l’Unité d’Habitation, construite en 1952, est célèbre pour être la première à utiliser le Béton Brut. Cette « ville verticale » comprend des appartements, des magasins et des espaces communs, incarnant le concept de vie centrée sur la communauté.
Tour Trellick – Londres, Royaume-Uni
Conçu par Ernő Goldfinger, ce gratte-ciel brutaliste emblématique présente un plan vertical audacieux avec des structures séparées pour les ascenseurs et les escaliers reliés par des passerelles. Sa façade imposante et ses fenêtres étroites sont aujourd’hui des symboles vénérés du brutalisme, après les critiques initiales.
Met Breuer – New York, États-Unis
Le Met Breuer, qui abritait à l’origine le Whitney Museum, a été conçu par Marcel Breuer en 1966, dans une structure monolithique et austère. Sa façade inclinée et ses fenêtres en retrait offrent une profondeur et un contraste fonctionnels, soulignant l’intention architecturale de chaque élément.
Torre Velasca – Milan, Italie
Conçue par le Studio BBPR en 1958, cette tour de 106 mètres est un symbole du brutalisme italien. Son design, qui rappelle les forteresses médiévales avec un large volume supérieur, a suscité un débat, étant considéré à la fois comme une œuvre emblématique et comme l’un des bâtiments les plus laids.
Torres Blancas – Madrid, Espagne
Malgré son nom, Torres Blancas est une tour brutaliste en béton apparent. Conçue par Francisco Javier Sáenz de Oiza, sa forme cylindrique organique et son design futuriste adoucissent les lignes typiquement rigides du brutalisme, offrant une nouvelle interprétation de ce style.